Mercy Rivadulla

Mercy Rivadulla… Jouer à la Ville Rêvée…

Dernière modification: mars 21, 2023

C’est, sans aucun doute, une peintre et architecte originale. Elle réordonne sa ville, La Havane, comme un casse-tête, à son goût et à sa manière, avec des huiles et des acryliques sur toiles. Le spectateur qui « visite » son œuvre pourra parcourir plein de sites, emblématiques ou non, et découvrir, par exemple le Morro, l’Université de La Havane, la Place de la Révolution, ou une simple maisonnette de n’importe quel quartier… sans détourner les yeux de ce quadrillage, pâté de maisons, ou comme vous souhaiteriez l’appeler. C’est une large lentille d’où l’on peut atteindre la belle capitale de l’Île caribéenne, vue depuis son prisme artistique.

Je vous présente… Mercy Rivadulla (La Havane, 1960). Avec ses œuvres, elle transmet la sensation qu’elle aimerait embrasser depuis l’architecture – éclectique et coloniale – les richesses culturelles, même les personnages typiques qui déambulent par La Havane, dans cet espace rêvé où respire tout ce qu’elle aime et qu’elle rappelle de l’endroit où elle est née. Chacune de ses peintures se révèle une aventure, une porte ouverte à l’esprit naissant, un morceau d’identité cubaine. C’est, en un mot, un tout petit poème qui convoque un dialogue différent de l’homme avec la nature environnante. Pour ce faire elle utilise, en plus d’une propreté impeccable, un bon goût par la couleur, cette lumière infinie – comme celle qui nous illumine chaque jour dans ce côté de la planète -, une haleine ingénue, humour créole et lyrisme ; des « adjectifs » avec lesquels l’on peut qualifier le travail de cette créatrice diplômée en architecture à l’Institut Supérieur Polytechnique José Antonio Echevarría (ISPJAE) vers 1984.

Parmi les formes et tonalités présentes dans ses créations, vous pourrez découvrir des détails de la ville que vous n’avez peut-être jamais remarqués. Ce sont les heures qu’elle a passées à marcher par les rues et les quartiers, toujours avec la rétine prête à capter ce que les autres ne peuvent pas voir pour le traduire après en protagoniste de ses cadeaux picturaux, ceux qui apparaissent dans un coin pour notre surprise visuelle, totalement restaurés. Dans son studio, avec une imagination infinie, elle modèle ses créations. En tant qu’architecte, elle regroupe les bâtiments de la ville à sa manière. Comme s’il s’agissait des briques d’une construction, elle prend des morceaux d’un immeuble et les place à l’endroit où elle considère qu’ils peuvent respirer. De cette façon, ses édifications grandissent, au-delà de styles, de matériaux, d’époques… Il y a des éléments coloniaux, des tuiles, des colonnes, des gratte-ciels, de petits palais, des maisons ordinaires…, qui transforment le visage de chaque construction dans ses mains. L’artiste n’est pas une fée marraine, elle n’a pas de « baguette magique ». Avec son imagination, la coupole du Capitole peut décorer, dans ses créations, un édifice de la Vieille Havane ; ou des colonnes doriques peuvent soutenir une maison en bois. Modernisme, art déco, le colonial… tout bouillit dans un même bâtiment. L’éclecticisme est sa boussole, car il embrasse tout ; c’est un mélange surréaliste, où les personnages inimaginables ne manquent non plus, ceux qui déambulent par la ville, et d’autres qu’elle emmène sans visas ni passeports d’autres latitudes pour nous faire rire, penser et nous distraire la vue et l’esprit.

Ce jeu à la ville… rêvée  transforme La Havane en une ville Merveille – ce qu’elle est – et nous offre, dans une seule image, de nombreux coins de notre capitale. Toutes ses œuvres sont porteuses du tampon « Fait à Cuba », parce que si l’on n’arrive à reconnaitre aucun détail qui l’identifie dans ses pièces, l’on trouvera toujours quelque chose de « bizarre », hors-série, un coloris exubérant, des femmes voluptueuses, une situation incroyable (le réel merveilleux de ces terres), ou un ciel parfaitement bleu et radieux qui révèle la nationalité. Cette créatrice a beaucoup « d’armes » pour séduire le spectateur. Avec le temps, elle a réalisé une « exploration » artistique par San Cristóbal de La Habana, cet espace magique, plein de surprises.

Toni Piñera
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Toni Piñera (La Havane, 1953) – Journaliste plus de 30 ans au journal Granma, critique d’art et danse, professeur à l’Académie Nationale des Beaux Arts San Alejandro, commissaire d’expositions d’art cubain (ancien directeur de la galerie La Acacia, La Havane), poète.

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